Les (vi)kings moderne du vélo.

Tout le monde le sait, l’Islande est connue pour ses paysages à couper le souffle. Mais pour en découvrir les coins les plus somptueux, c’est dans l’intérieur sauvage du pays qu’il faut aller. La réserve naturelle de Fjallabak, cachée derrière les glaciers Eyjafjallajökull et Mýrdalsjökull, est l’un des plus beaux endroits des hautes terres islandaises. Cette vaste zone figure parmi les régions volcaniques les plus spectaculaires d’Islande et se compose de couleurs et paysages variés, inégalés en Islande.

Parmi les beautés qu’elle recèle, citons les volcans, les glaciers, les canyons, les champs de lave noire couverts de mousse verte, les déserts de sable et de pierre, les sources chaudes géothermiques, les lacs de montagne et les cascades impressionnantes. La Réserve naturelle de Fjallabak est accessible en 4×4 via plusieurs pistes uniquement ouvertes pendant l’été. Nous avons toutefois décidé de parcourir cette région de façon ‘Viking moderne’, c’est-à-dire sur un vélo gravel !

Avant de relater notre périple, remontons le temps jusqu’en 2015, année où j’ai traversé en VTT l’une des régions les plus sauvages et les plus désolées d’Islande. C’est alors qu’a germé l’idée de revenir ici pour d’autres aventures cyclistes. En 2017, ma compagne a fondé Modern Vikings, une agence spécialisée dans les voyages en Islande. Très vite, nous avons reparlé d’un séjour à vélo : nous avons commencé à établir un itinéraire et à planifier le voyage. Six ans plus tard, notre rêve est à portée de main : avec un groupe de gravelistes et de vététistes, nous allons parcourir la Fjallabak Traverse, soit plus de 450 kilomètres et 5000 mètres d’altitude, en hors-piste entre glaciers, sources chaudes et volcans. Et nous serons les premiers, puisque cette traversée n’a jamais été réalisée à vélo. Nous séjournerons dans des refuges de montagne, et nos bagages et repas seront transportés dans un 4×4.

Bienvenue en Islande

À notre arrivée, en juillet 2021, il fait un froid glacial. L’île est secouée de rafales soufflant jusqu’à 100 km/h. Nous chargeons nos vélos et mettons immédiatement le cap vers le sud-ouest de l’Islande, qui sera le point de départ de notre itinéraire en VTT et gravel. Nous empruntons une route magnifique qui serpente à travers des paysages moussus, des chutes d’eau, des falaises rocheuses accidentées et de vastes champs de lave. En chemin, nous faisons un court arrêt à la chute d’eau Seljalandsfoss. Un sentier mène jusqu’à l’arrière de la cascade : c’est une expérience impressionnante que de marcher derrière ce majestueux rideau d’eau.

Notre première journée est consacrée à un dernier test de cyclisme et de condition physique. Nous partons explorer les environs de Kirkjubæjarklaustur et découvrons Fjaðrárgljúfur, considérée par beaucoup comme la plus belle gorge d’Islande. Même au cours de ce premier trajet de reconnaissance, les roches de lave s’avèrent traîtres pour nos pneus et notre matériel. Première crevaison. Il semble que nous nous préparons à un duel entre les adeptes du VTT et ceux du gravel… Dans notre maison d’hôtes, nous savourons un succulent repas traditionnel en écoutant d’une oreille avide les sagas historiques locales que nous raconte notre hôtesse… L’alcool coule à flots. Pas idéal la veille de notre départ, mais après tout, nous passerons les prochains jours dans des refuges de montagne isolés.

Rivières et gorges volcaniques

Notre parcours suit approximativement la Mid Atlantic Ridge de la Réserve naturelle de Fjallabak. La dorsale médio-atlantique est en réalité une chaîne de montagnes sous-marine qui se situe au fond de l’océan Atlantique. Totalisant quelque 16.000 kilomètres, c’est la plus longue et la plus étendue au monde, mais comme elle est majoritairement sous-marine, elle n’est pas visible. Les montagnes émergent à quelques endroits seulement, dont l’Islande. Les volcans et les glaciers forment des paysages très variés. Le terrain rocheux, les champs de lave, les flancs de volcans abrupts et les rivières infranchissables (où l’on trouve parfois une unique piste) rendent notre expérience inoubliable.

Notre première étape n’est pas de tout repos, puisqu’elle compte 100 kilomètres et plus de 2000 mètres d’altitude. Nous quittons le monde civilisé et suivons une piste vers la région de Laki ou Lakagígar, où un volcan à crevasses qui a provoqué une énorme catastrophe naturelle à la fin du 18e siècle. Avec ses 24 kilomètres, il s’agit de la plus longue fissure volcanique au monde. Une piste en terre serpente à travers un paysage vallonné très érodé et nous fait traverser d’interminables déserts de lave et de sable. Nous arrivons à notre première rivière.

Au début, nous faisons preuve d’une grande prudence et troquons nos chaussures de vélo contre des chaussures imperméables. Mais au bout d’un moment, nous gagnons en confiance et tentons de franchir les rivières à vélo, tels des Vikings modernes. Spoiler : l’expérience n’a pas toujours été une réussite… Les vététistes traversent aisément une rivière d’une cinquantaine de mètres de large. Admiratifs, les gravelistes doivent pourtant poser pied à terre. La vue est somptueuse : sous des nuages sombres et menaçants, une étendue semblable au Mordor s’étend devant nous avec ses roches de lave noire. Soudain, le soleil apparait et nous admirons l’horizon avec émerveillement. Notre lieu de couchage, le refuge de Hólaskjól, borde une coulée de lave qui s’est solidifiée de façon plutôt fantaisiste. Non loin, une cascade est entourée de colonnes de basalte parfaitement formées. Notre voyage est intense et nous aurons encore beaucoup d’anecdotes héroïques à raconter…

Entre rêve et cauchemar

Aujourd’hui, nous pénétrons plus profond dans l’intérieur des terres. Nous suivons une rivière qui ondule entre la roche de lave et les collines moussues, d’un vert vif. En passant par une crête naturelle de basalte, nous traversons une rivière de montagne au cours sauvage et arrivons aux lacs Swan, véritables oasis de paix et de verdure. De là, nous pédalons sur des pistes splendides et des routes de gravier en direction de l’imposant glacier Mýrdalsjökull

À côté de la calotte glaciaire, nous passons par un paysage lunaire irréel, couvert de sable et de cendres volcaniques. Le glacier nous semble très proche, puisque la température chute soudain de plusieurs degrés. Ça et là, des cônes volcaniques verts se dressent au-dessus de la plaine noire, comme au mont Mælifell, l’un des sites les plus emblématiques d’Islande. Une pyramide impressionnante couverte de mousse verte surplombe, seule, ce vaste désert noir. Nous pataugeons dans quelques petites rivières entrelacées et après quelque temps, les paysages en noir et blanc font place à une surprenante végétation de mousse verte. Nous perdons un peu de temps à cause d’une panne. Un tendeur maintient désormais l’embrayage défectueux en place : cela devrait suffire pour atteindre l’arrivée, même à deux vitesses. Nous tombons alors sur un cul-de-sac et nous sommes contraints de parcourir les cinq derniers kilomètres à pied. Nous montons notre camp près d’une rivière, où Fred et Dieter, nos chefs, nous préparons un succulent plat de saumon grillé. La nuit est courte, au refuge d’Hungurfit, à la fois en raison des histoires que l’on se confie, mais aussi des ronflements émis par un bruyant groupe d’Islandais, tard dans la nuit…

Une pintje dans une source chaude

Aujourd’hui, notre périple nous mène à travers des champs de lave sombre, aux allures fantasques, et le long de flancs de montagne aux couleurs pastel, à la jonction tectonique entre l’Eurasie et l’Amérique du Nord. C’est une région façonnée par les éruptions volcaniques, accidentée et imprévisible. La piste, particulièrement bien adaptée au gravel, rejoint les itinéraires du célèbre sentier de randonnée Laugavegur : nous passons devant des nuages de vapeur, des sources chaudes bouillonnantes et des dépôts de soufre multicolores. Nous nous trouvons dans l’une des régions géothermiques les plus actives d’Islande. Nous nous arrêterons plus tard à Landmannalaugar, un site de bivouac mondialement connu. Cette zone volcanique active est remarquable pour ses montagnes de rhyolite qui offrent une fantastique palette de couleurs, du bleu au vert en passant par le rouge et l’orange. Le Landmannalaugar est une vallée majoritairement couverte de lave, d’où jaillit d’une rivière d’eau chaude.

Les Vikings Modernes sont sur le coup, on vous le garantit ! Nous nous glissons dans ce bain chaud divin en sirotant nos bières. Nous mettons ensuite le cap vers notre refuge sur des pistes assez faciles. Un gigot d’agneau au barbecue clôture en beauté cette journée parfaite.

La porte de l’enfer

Nous arrivons petit à petit à la fin du voyage. Nous pédalons vers notre destination sur un sol de lave sablonneux. Cette fois, c’est le redoutable volcan Hekla qui constitue notre point de repère. Il s’agit d’un des volcans les plus actifs d’Islande, et par extension, de la planète. Depuis la colonisation de l’Islande, il est entré en éruption 18 fois, et on prévoit une éruption majeure chaque année. Nous roulons littéralement sur des cendres volcaniques, en slalomant entre les gros morceaux de lave solidifiés qui ont été expulsés par le monstre. Malgré la menace de l’Hekla, le soleil omniprésent sublime le spectacle. On est loin de la ‘Porte de l’Enfer’, surnom qui a été attribué au volcan…

Les pistes de gravier sinueuses nous rapprochent inexorablement de la civilisation, les cendres de lave noire laissent peu à peu place à la mousse et à un sol fertile. Bien sûr, nous parcourons nos derniers kilomètres contre le vent. Féroce, celui-ci nous oblige à aller puiser nos dernières forces dans nos réserves. Les pionniers de la traversée de Fjallabak ont prouvé qu’ils étaient de l’étoffe des Vikings Modernes pendant ces cinq journées grandioses. L’expérience fut intense, une vraie randonnée de l’enfer. Quant au résultat du duel de vélos… Les VTT l’emportent haut la main, même les gravelistes en conviennent.

Une éruption surprise

Fini les vélos et place à la détente ! Ou presque… Notre dernière journée en Islande devait être ponctuée de visites touristiques tranquilles et de bières fraîches à Reykjavik. Mais un volcan actif gronde à une centaine de kilomètres seulement. Impossible de manquer le spectacle ! Dans la petite ville côtière de Stokkseyri, nous dégustons la meilleure soupe de langoustine d’Islande. Nous poursuivons notre trajet vers la péninsule de Reykjanes, dans le sud-ouest de l’Islande. C’est là que le volcan Fagradalsfjall est en éruption depuis le 19 mars 2021. Selon les normes islandaises, ce n’est qu’une petite éruption, mais elle nous impressionne beaucoup ! Au fond d’une crevasse de 500 mètres, on voit la lave jaillir de terre. Et le pire, c’est qu’on peut s’y rendre à pied ! Les Islandais l’ont surnommé le ‘volcan touristique’ : il est facilement accessible et on ne court aucun danger si l’on respecte les consignes. La randonnée s’avère difficile, nous marchons jusqu’au mur de lave déjà solidifié de la vallée Nátthagi, puis jusqu’à Langihryggur. Plus nous montons, plus nous apercevons le cratère et la lave en fusion. Après des jours de vélo à travers des champs de lave solidifiés, c’est le point d’orgue de notre expédition. Nous assistons en direct à la création de ce fameux paysage islandais. Une expérience incroyable ! Nous prenons notre temps pour admirer le spectacle. Les pères appellent leurs enfants, on prend des photos, et on se laisse surprendre par des pensées philosophiques. Ce soir-là, nous levons nos verres à une expérience cycliste aussi intense qu’exceptionnelle, à tous ces spectacles à couper le souffle, mais surtout, à l’amitié qui unit les Vikings Modernes.

Modern Vikings

Modern Vikings est une agence spécialisée qui n’a qu’un seul objectif : vous faire découvrir les merveilles de l’Islande ! Cette agence est le résultat d’une passion dévorante pour ce pays magique. Grâce à leur grande expérience du voyage, du travail et de l’hébergement en Islande, ils sont en mesure de proposer un programme de voyage unique, qui sort largement des sentiers battus. Roadtrips à travers des paysages irréels, randonnées au milieu des phénomènes naturels ou rêveries sous les aurores boréales… Mais ce n’est pas tout ! Plus que jamais, l’Islande est devenue un lieu prisé de la gastronomie, un valhalla pour les mélomanes et la destination ultime pour la détente et le bien-être. Modern Vikings propose des expériences de voyage qui sortent de l’ordinaire. Outre les circuits plus classiques, l’agence se concentre sur les voyages aux thématiques les plus variées. Les mots d’ordre ? Local, pur et authentique. L’Islande n’est pas seulement un pays à voir, c’est surtout un pays à vivre. La prochaine édition de la traversée épique de Fjallabak est prévue pour l’été 2023.

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